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2024-07-05 | Readers 268 | Share with your Twitter followers Share on Facebook | PDF

LA JAMBE QUI EST RESTEE AU FRONT


LA JAMBE QUI EST RESTEE AU FRONT

Récit du vécu quotidien dans les prisons secrètes d’Irak

de Sayyed Nasser Husseini-Pur

Trad. Ibrahim Muntu Betu

Ed. al-Mustafa International Translation and Publication Center 2019

Ce livre de près de 700 pages est le journal tenu par s. Nasser Husseini Pur, lors de sa détention dans les prisons secrètes de Saddam Hussein en Irak. Il était parti au front pour combattre l’invasion des troupes irakiennes de Saddam Hussein avec l’appui de l’Occident, alors qu’il n’avait que 14 ans (il avait modifié son âge sur sa carte d’identité !)

Deux ans plus tard, il fut fait prisonnier, gravement blessé à la jambe, dans l’île Majnûn. Sa capture (le 3 juillet 1988) eut lieu peu de temps avant la fin de cette guerre injuste imposée à la nouvelle République Islamique d’Iran (R.I.I.) (22/9/1980-20/8/1988). Sa captivité dura cependant plus de 2 ans (808 jours) et il ne fut libéré que le 14 septembre 1990, avec une jambe en moins.

Ce livre comprend 15 chapitres que l’on peut regrouper ainsi :

uLes deux premiers chapitres racontent son tour de surveillance des activités ennemies irakiennes, les violents affrontements déclenchés à l’aube qui aboutirent à la prise d’al-Khandak par les troupes irakiennes, au martyre de la plupart de ses compagnons d’arme après leur vaillante résistance et à sa capture, blessé à la jambe. L’armée irakienne avait une puissance de feu beaucoup plus grande, du fait du blocus imposé à la R.I.I.. Prisonnier, il reçut à nouveau deux balles dans ses jambes parce qu’il refusait d’insulter l’imam al-Khomeynî(qs). Il fut alors témoin de la sauvagerie du comportement des soldats de Saddam Hussein. Il fut d’abord traîné sur le côté ouest d’al-Khandak pour le rassemblement de tous les prisonniers avant d’être tous emmenés au QG de l’armée irakienne à Maïmouna au sud-est de l’Irak où les premiers interrogatoires eurent lieu (le 3e chapitre). Des membres de l’organisation [terroriste] iranienne al-Mujahidin [al-Munafiqin-les hypocrites] al-Khalq accompagnaient les Irakiens et leurs servaient d’interprètes et d’espions !

uLes chapitres 4, 5 et 6 racontent le transfert des prisonniers à Bagdad, dans la prison d’ar-Rashîd (du nom du calife/roi abbasside Haroun ar-Rashîd), située dans le QG de la police de Bagdad. Emprisonné dans cette prison sans aucun soin, l’état de sa jambe s’empira : elle était en train de pourrir. Si ce n’était la puanteur qui s’en dégageait au point de déranger même les gardiens, il ne la sentait plus. Il fut alors placé à l’extérieur, dans la cour de la prison. 15 jours plus tard, il fut enfin emmené à l’hôpital où on l’amputa de sa jambe. Il avait à peine 16 ans ! Devant son refus de se plier à leur desiderata de trahison, il fut ramené à la prison d’ar-Rashîd. Une dizaine de jours plus tard, les prisonniers furent tous transférés au camp de Tikrit au nord de l’Irak.

uLes chapitres 7 à 12 parlent de sa détention au Camp annexe de Tikrit. Souffrant d’une dysenterie, il fut emmené à l’hôpital d’al-Qâdissiyya à Tikrit (surnommé par les prisonniers « l’abattoir des prisonniers innocents »), puis ramené au Camp. C’est alors qu’eut lieu la déclaration de la fin de la guerre. Leurs conditions de détention s’améliorèrent petit à petit jusqu’au moment de leur libération.

uPuis ce fut leur transfert à Ramâdî, à 110 km à l’ouest de Bagdad (les chapitres 13 et 14), fin août 1990 et leur passage à l’hôpital 17 Tammuz.

uEt enfin sa libération et son retour en Iran, avec une canne dans la main droite et l’espoir d’avoir une jambe artificielle.

Ce livre est plein de témoignages de bravoure, de foi, de loyauté, d’engagement sincère envers Dieu, l’imam al-Khomeynî(qs) et la R.I.I., de sacrifices, de dignité, de souffrances, d’endurance face aux tortures, aux coups subis, aux actes d’humiliation, etc. A lire assurément !

Il mérite que les problèmes de langue soient rapidement négligés au profit du fond et des nombreux messages transmis, autant d’exemples à suivre.

www.lumieres-spirituelles.net     No129 – Muharram-Safar 1446 – Juillet-Août 2024

Citations* de La jambe qui est restée au front

 

u« Tout à coup, je sentis comme si le côté droit de mon corps était devenu plus court. Je tombai sur le sol, je regardai pour voir qu’est-ce qui était arrivé, je fus choqué par ce qui m’était arrivé. L’os de ma jambe droit avait été réduit en miettes. Les balles m’avaient atteint à la cheville du pied droite. Le talon et l’articulation de mon pied étaient indemnes, seule la chair de la jambe avait été déchiquetée. Environ sept à huit centimètres au-dessus de l’articulation. Les os de mon pied avaient été déchiquetés. Mon talent ne tenait plus à mon pied par la peau et les veines. Les os de ma jambe avaient été mis en pièces de telle sorte que mon talon tournait à tous les sens. Le sang ne s’arrêtait pas de couler. »(p59)

 

u« Quelques membres de l’OMK1

1.L’Organisation des Moudjahidines du Peuple Iranien (OMPI) (…), étant à l’origine un mouvement d’opposition au Chah d’Iran, dévia de son objectif premier à l’issue du triomphe de la Révolution Islamique et devint un jouet aux mains des services des renseignements étrangers. Les membres de cette organisation ont fui en Irak et d’autres se sont réfugiés en Europe et aux Etats-Unis. Elle est appelée en Iran « Groupuscule des Hypocrites (Grûhak Munâfiqîn)».

accompagnaient les irakiens. Les agents de ce groupuscule des hypocrites servaient d’interprètes et d’espions. Sur la route de Khandak un de leurs agents servait d’interprète à un journaliste irakien. »(p101)

 

u« M’ayant posé sur le sol et non sur un brancard, ils me trainèrent à travers les spacieux couloirs des toilettes de la garnison. (…) Il y avait beaucoup de blessés que je ne connaissais pas. (…) Les couloirs des toilettes étaient mouillés et forts sales; il y avait des excréments partout. (…)

Nous nous servîmes de nos dents pour nous délier les bras les uns les autres. Nous accomplîmes aussi la prière de l’aube dans le couloir des toilettes sans tayammum1

1. L’ablution sèche, c’est-à-dire qui se fait sans eau. (N.D.T.)

 ni turba2

2. Parcelle moulée de terre sur laquelle les chiites posent le front en se prosternant pour la prière. (N.D.T.)»(pp123-124)

 

u« - Vous connaissez aussi le Coran, les religieux vous ont inculqués ces paroles; nous sommes les transgresseurs; Dieu n’aime pas les irakiens; Dieu est seulement votre Dieu, les iraniens!

A cet instant, son ton devint dur et il dit en haussant la voix:

- Ecoute bien zoroastrien, le Coran que tu es en train de réciter, c’est nous les arabes qui vous l’avons appris. Vous n’étiez qu’une bande de mazdéens, si on ne vous avait pas appris le Coran, vous mazdéens, tous les iraniens seraient des mécréants à l’heure actuelle. »(p130)

 

u« Une foi à Baghdad, ce fut le début de la série des interrogatoires. Les prisonniers se présentaient un à un devant la table du colonel pour interrogatoire. Ils enregistraient, avant toute question, les informations personnelles et militaires des prisonniers. Le colonel à l’instar des enquêteurs de la quatrième légion était à la recherche des commandants. La plupart de prisonniers s’identifiaient comme étant des agents de ravitaillement, des pilotes, des secouristes, des chauffeurs, des aide-soignant, des serveurs de thé, des agents des sections de santé publique, d’assistance, d’approvisionnement et d’ingénierie-mécanique. »(pp173-174)

 

u« Il faisait nuit. Nous étions dans les cellules. Les gardiens dansaient dans la cour de la prison; nous ne connaissions pas le pourquoi? (…) Suabâh [un gardien irakien] était content. Il appela un interprète iranien et dit: les américains ont abattu vos avions avec des missiles!

Lorsqu’il dit cela, je pensais peut-être que dans la guerre, les irakiens ou les américains avaient abattu les avions de guerre iraniens. Pour moi, la destruction d’un avion de guerre était une chose normale!

Avec plus d’éclaircissement de Suabâh, j’ai compris que les américains avaient abattu nos avions de transport des voyageurs1 au-dessus des eaux du golfe persique. »(pp198-199)[(1)]

 

u« Je ne sais pas pourquoi en 1368 [~ 1989 NdeLS] on devait, lors du contrôle physique le matin, à midi et le soir, commencer obligatoirement par insulter l’imâm Khomeyni. Or après l’émission de sa fatwa historique contre Salman Rushdi, l’imâm Khomeyni avait acquis une grande popularité auprès des musulmans voire sunnites. Après l’émission de cette fatwa, certains surveillants sunnites qui insultaient l’imam ont commencé à mentionner son nom avec respect. Il était normal que cette popularité acquise par l’imam mette Saddam Hussein ainsi que les autorités du parti baathiste du régime irakien dans une colère noire. »(p426)

*Nous rappelons que les citations sont des reproductions telles quelles de passages du livre, sans correction de notre part.

 

[(1)[NdeLS résumant la note 1 du livre p 199.] Le 3 juillet 1988, un croiseur lance-missiles américain avait abattu, au-dessus des eaux territoriales iraniennes, un Airbus A300B2 d'Iran Airqui survolait le détroit d'Hormuz depuis la ville portuaire de Bandar Abbas vers Dubaï. Tous les passagers, 274 voyageurs et 16 membres d'équipage, y trouvèrent la mort. Et le commandant du navire de guerre américain fut décoré par le président des Etats Unis.]

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